Montréal veut freiner l’installation de dos d’âne
Par Pierre-André Normandin
publié dans La Presse
Le 26 octobre 2011
D’un côté, les citoyens qui demandent à leurs élus de ralentir la circulation dans leur quartier. De l’autre, les pompiers qui voient un danger pour la sécurité publique dans la prolifération des dos d’âne dans les rues de la métropole. Au coeur de cet épineux problème, la Ville de Montréal souhaite dorénavant forcer arrondissements et villes défusionnées à consulter le Service des incendies (SIM) avant de mettre en place des mesures d’atténuation de la circulation. Un intense débat a déchiré l’hôtel de ville, lundi et hier. L’administration Tremblay a proposé de confier aux pompiers une sorte de « veto » sur les mesures prises pour ralentir les automobiles. Devant la levée de boucliers de l’opposition, le conseil municipal a plutôt décidé de renvoyer la question à la Commission sur la sécurité publique.
L’administration reste tout de même déterminée à imposer un frein aux mesures d’atténuation de la circulation dans l’ensemble de l’île devant les craintes soulevées par la prolifération des dos d’âne au SIM. « C’est la même chose que quand on reçoit une analyse disant que l’eau d’une piscine n’est pas propre, on la ferme. Si un ingénieur nous dit qu’une structure est dangereuse, il faut qu’on la ferme tout de suite. C’est la même chose avec la sécurité incendie », a plaidé Michael Applebaum, président du comité exécutif, pour justifier la décision.
Le chef pompier, Serge Tremblay, a témoigné hier devant les élus du danger que peuvent représenter les dos d’âne. Au cours des trois dernières années, 25 pompiers ont été blessés après que leur véhicule eut heurté durement un dos d’âne. Trois d’entre eux ont dû s’absenter du travail environ 10 semaines chacun. Le directeur du SIM a de plus cité une étude menée en 1997 dans la ville de Boulder, au Colorado, selon laquelle pour chaque vie sauvée par les mesures d’atténuation de la circulation, jusqu’à 85 personnes pourraient mourir en raison des délais d’intervention pour les services d’urgence. Serge Tremblay indique que chaque dos d’âne ralentit de 7 à 10 secondes ses véhicules. Additionnés, ces délais peuvent faire la différence entre la vie et la mort pour les 1300 arrêts cardiovasculaires pour lesquels les pompiers sont appelés à intervenir chaque année.
L’opposition a toutefois fait front commun contre ce « veto », soulignant que cinq piétons par jour sont blessés à Montréal. Un conseiller de l’arrondissement du Plateau, Carl Boileau, voit dans la décision « une déclaration de guerre » contre les pouvoirs des arrondissements. Le maire de Rosemont-La Petite-Patrie, François Croteau, a souligné que les mesures d’atténuation de la circulation représentent l’une des principales préoccupations des citoyens. Il précise que les dos d’âne sont ajoutés seulement autour des écoles, des résidences de personnes âgées et des parcs, des secteurs peu utilisés par les services d’urgence.
Tentant de se faire rassurant, le président du comité exécutif, Michael Appelbaum, a assuré que la Ville « n’est pas contre les mesures d’apaisement ». « Tout ce qu’on demande, c’est que les arrondissements reçoivent l’autorisation, un avis favorable du service incendie », a-t-il affirmé.
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