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Pratiques politiques en France et au Québec: un océan de différence ?

Conférence sur les pratiques politiques en France et au Québec, un océan de différence ?
Une Conférence animée par Raphael Crevier.

Après avoir lancé début 2009 un processus de réflexion sur les différences de pratiques politiques entre nos pays d’origine et notre pays d’accueil au sein de la section du Parti socialiste français de Montréal, nous avons souhaité organiser un événement plus grand public afin d’en débattre en présence d’un universitaire québécois et de voir à quel point notre manière d’aborder la vie politique pouvait diverger ou se rapprocher d’un bord de l’océan à l’autre. Pour ce faire, nous demanderons à nos intervenants de nous parler de leurs parcours mais aussi de la manière dont il perçoivent les phénomènes politiques tant ici au Québec qu’en France. Nous nous intéresserons par exemple à la manière dont se forme et émerge le personnel politique de nos deux pays et les critères déterminants dans leurs réussites électorales (profil, idéologie, …).

Date : jeudi 21 janvier 2010, de 19 h 30 à 22 h

Où ? À l’UQAM – Pavillon Judith-Jasmin (J) – 405, rue Sainte-Catherine Est à Montréal [Voir la carte]

En présence de :

  • Maka Kotto, Maka Kotto (né le 7 décembre 1961) est un acteur et homme politique québécois originaire du Cameroun. Il est maintenant député de la circonscription provinciale de Bourget pour le Parti québécois après l’avoir été à la Chambre des communes du Canada pour le Bloc québécois dans la circonscription de Saint-Lambert. Il est actuellement porte parole de l’opposition officielle en matière de culture et communications, depuis le 9 janvier 2009.
  • Carl Boileau, élu conseiller municipal dans le Plateau-Mont-Royal à Montréal le 1er movembre 2009, il est également concepteur multimédia.
  • Franck Scemama, conseiller des Français de l’étranger pour le Québec, secrétaire de la section de Montréal du Parti socialiste.

Compte rendu de la confénce du 21 janvier 2010

I. Vision des pratiques politiques en France et au Québec

Selon Maka Kotto, qui se présente comme un homme de gauche, l’opposition gauche / droite disparaît derrière la nécessité de se positionner au Québec comme souverainiste ou fédéraliste. Ainsi la PQ apparaît-il comme une constellation de sensibilités. Toutefois, la société libérale constitue un socle commun. Le débat de société se ramène alors à des « chicanes » sur la place publique. Lucien Bouchard (1996-2001), puis Bernard Landry (2001-2003), deux anciens Premier ministres PQ du Québec, avaient pris des mesures sociales drastiques. Les deux derniers chefs du PQ, André Boisclair et Pauline Marois, ont ensuite « ramassé un parti en morceaux » et ont dû gommer toutes les divergences idéologiques et donner la priorité à l’obtention du maximum de compétences pour le Québec. Si un jour la souveraineté est abandonnée, un débat gauche-droite verra peut-être le jour au Québec. Il note que ce débat est plus perceptible au niveau fédéral et que le Bloc, qui défend les intérêts du Québec à Ottawa, ne met jamais en avant la question de la souveraineté au Parlement fédéral.

Il note qu’en France, les anciens élèves de l’ÉNA gravissent rapidement les échelons dans la politique et y font carrière, ce qui n’est pas le cas au Québec où les politiques sont d’origines très variées.

Pour Carl Boileau, qui a fait un stage à Paris chez les Verts, l’histoire d’un pays est importante pour l’émergence de la démocratie. Il note que le Canada est ressenti par les souverainistes québécois comme le pays colonisateur et donc, comme l’adversaire. Il se souvient qu’en 1998, lors de la Coupe du Monde de football, les Québécois avaient peu à peu pris le parti de l’équipe de France et qu’il était devenu difficile de distinguer quels étaient les supporters français des supporters québécois, ce qui semblerait indiquer que les Québécois se sentent plus proches de la France que du Canada. Carl considère par ailleurs que le système démocratique français est plus mature que le système québécois et considère qu’il y a un déficit démocratique au Québec. Il pose aussi la question : l’indépendance du Québec, pourquoi faire ?

Franck Scemama : En France il existe une « école républicaine de la politique » s’appuyant sur des établissements comme Sciences Po ou l’ÉNA. Au Québec, la société semble plus diversement représentée même si certaines professions comme les avocats ou les médecins sont surreprésentées. Il fait un parallèle entre le débat en France sur le projet de traité constitutionnel européen et le débat au Québec sur le fédéralisme : d’un côté, on vise une plus grande intégration européenne, de l’autre une totale indépendance de la fédération canadienne. Il tempère le propos de Carl sur la démocratie en France en notant que nous avons une république « aristocratique » et un président « monarque ».

II. Questions / réponses

1. Pourquoi n’y a-t-il pas de débat gauche / droite ? Est-ce parce qu’il n’y a pas de remise en question de la société libérale ? Y aura-t-il une démarcation gauche / droite lorsque le débat souverainisme / fédéralisme sera évacué ?

  • Pour Maka, les débats gauche / droite existent à la Chambre des communes, par exemple lors du vote du budget. Ce sera peut-être le cas au Québec lorsqu’il n’y aura plus de débat souverainisme / fédéralisme. La question du scrutin proportionnel a déjà été abordée au Québec (Jean-Pierre Charbonneau).
  • Carl pense que le système uninominal à un tour est le handicap du Québec. En France, il existe une logique filiale dans les partis politiques.
  • Franck rappelle que l’élection des maires, même si elle se fait sous les couleurs d’un parti politique (contrairement au Québec), est moins en lien avec le positionnement gauche / droite qu’avec l’appréciation sur les qualités de bonne gestion. Ainsi Paris a largement voté pour la réélection de Bertrand Delanoë alors que moins d’un an auparavant les même électeurs avaient majoritairement voté pour Nicolas Sarkozy à la présidentielle.

2. Bertrand déplore le manque d’humilité et de qualités morales chez les politiques et pourtant, l’exemple devrait venir d’en haut. Les politiques n’emportent les élections qu’avec une minorité du corps électoral compte tenu de la faible participation, ce qui affaiblit leur légitimité. L’abstention nuit à la démocratie, encore plus au Québec qu’en France. Il faut donc réhabiliter l’homme politique.
Bertrand questionne alors les invités : quel projet de société veut-on pour le Québec et comment demander aux électeurs de se prononcer pour l’indépendance si on ne leur dit pas ce que l’on veut en faire ?

  • Pour Maka, la question du projet de société est évoquée « en interne ». Chez les souverainistes, il y a des militants de gauche et de droite, d’où l’absence de présentation d’un projet de société durant les campagnes électorales. Les politiques ont tendance à avoir un ego surdimensionné et, une fois élus, se souviennent-ils pourquoi ils l’ont été ? L’humilité est chose rare en politique et devrait pourtant être une qualité première.
    Maka précise que les groupes de pression sont nombreux à Ottawa et qu’ils remplacent les citoyens. Les intérêts du « marché » vont à l’encontre de l’indépendance des élus.
  • Carl pense qu’il faut limiter les mandats, ce que Québec Solidaire propose avec Amir Khadir, seul élu de sa formation au Parlement de Québec.
  • Maka rappelle que René Lévesque a mis fin au cumul des mandats en 1976. Il tient au passage à souligner que le PQ ne combat pas Amir Khadir, mais que c’est l’inverse…
  • Franck se demande alors quel genre de personnel politique est proposé au choix de l’électeur. A-t-on les politiques que l’on mérite ? Il regrette par ailleurs la simplification du discours politique qui, élections après élections, semble se confirmer.

Suivent alors les sujets suivants :

  • La question du carriérisme ;
  • La question de la limitation du nombre de mandats ;
  • Maka et Carl confrontent leurs visions du PQ et de QS et débattent de la meilleure stratégie pour atteindre la souveraineté.

Cette section de mon blogue principal
est dédiée à Josée Legault, inspiratrice de mon cheminement politique.
Puis aussi, à tous les autres journalistes impliqués par le juste récit de notre histoire collective.