Toussaint remporte l’investiture du PQ dans Mercier
par Marie-Claude Lortie
dans La Presse
le lundi 5 mars 2001
Le comté de Mercier, cette circonscription montréalaise qui a tant fait parler d’elle cet hiver à cause de l’affaire Michaud, s’est finalement choisi un candidat péquiste. Ce sera Claudel Toussaint, le militant d’origine haïtienne que la direction du parti espérait voir à ce poste.
M. Toussaint a gagné l’investiture hier après un seul tour. Le parti a gardé secret le nombre de votes en sa faveur. Mais pour être élu, il lui fallait 50 % des appuis plus un vote et il y avait hier dans le sous-sol de l’église Saint-Denis, sur le Plateau, où se tenait l’assemblée d’investiture, environ 340 membres inscrits autorisés à voter.
Pierre Tadros, un des quatre autres candidats, est arrivé en deuxième place.
Le parti a refusé de dire comment les autres candidats se sont classés. On n’a donc pu savoir combien de péquistes ont appuyé Carl Boileau, un jeune militant qui avait soulevé la foule et déclenché de vifs applaudissements durant son discours en après-midi, en affirmant son appui à Yves Michaud.
Ce n’est pas la première fois qu’un candidat issu d’une minorité visible gagne l’investiture péquiste, mais c’est rarement dans un comté aussi sûr que Mercier, la circonscription du Plateau remportée par Gérald Godin en 1976 et gagnée depuis sans interruption par le PQ, avec de solides majorités.
Le PQ se cherchait un candidat parce que l’ancien ministre, Robert Perreault (qui appuyait M. Toussaint), a démissionné en septembre dernier. Le gouvernement a maintenant jusqu’au 6 avril pour y déclencher une élection partielle.
C’est dans ce comté que voulait se présenter Yves Michaud, le militant péquiste blâmé unanimement par l’Assemblée nationale pour une série de déclarations jugées inacceptables par les élus et qui ont offensé particulièrement les Québécois juifs.
Hier, M. Toussaint, qui a fait campagne avec un programme « souverainiste et progressiste », a évité de parler de l’affaire Michaud dans ses discours et a expliqué aux journalistes qu’il n’avait pas fait campagne sur ce thème.
M. Toussaint, un attaché politique du ministre des Relations internationales Sylvain Simard, a plutôt lancé un appel à la réconciliation en disant qu’il « tendait la main » et invitait les militants à s’asseoir autour d’une table « pour exprimer nos différences et nos divergences ».
L’affaire Michaud a laissé une cicatrice dans Mercier où beaucoup de militants n’ont pas apprécié que ministres, députés et autres membres du PQ de l’extérieur du comté viennent se mêler de leurs affaires en blâmant M. Michaud, qui voulait s’y présenter. M. Michaud n’était pas le candidat de l’establishment du parti mais celui choisi par l’association de comté, traditionnellement très indépendante.
L’arrivée de M. Toussaint, qui s’est faite juste après le retrait de la course de M. Michaud, n’a pas fait disparaître ce sentiment d’aliénation par rapport à l’establishment du parti qui s’est exprimé de multiples façons.
Un candidat à l’investiture de la première heure, Bruno Viens, s’est retiré de la course au début de février en disant qu’il ne se reconnaissait plus dans le parti.
Puis, André Reny, le président de l’association de comté, a écrit une lettre aux journaux pour dire qu’il ne se présenterait pas, et là encore, a blâmé la direction du parti pour son ordre du jour trop de droite. Samedi, au conseil national du PQ, M. Reny, a carrément démissionné sur une question de principe touchant les politiques linguistiques du PQ.
M. Toussaint, qui a remercié hier « les militants que sont Bernard Landry, Louise Harel, André Boisclair », a été perçu dès son arrivée dans la course comme le candidat parachuté par la direction du parti pour redorer son image auprès des minorités et des Québécois heurtés par les propos de M. Michaud.
Hier, seulement 45 % des membres du parti dans Mercier ont voté (environ 340 personnes sur 796 membres en règle). M. Toussaint a dit qu’il ne pouvait s’expliquer ce faible taux de participation. Peut-être est-ce à cause du congé scolaire, a-t-il avancé.
Chose certaine, même si un des candidats, Gaëtan Dostie, a déclaré que Mercier était « le poumon artistique du Québec », les comédiens, cinéastes et autres artistes qui étaient les piliers du PQ dans Mercier à une certaine époque brillaient par leur absence hier à l’assemblée d’investiture.